INTERVIEW : 2007-07-08 Joseph Arthur : celui qui crée plus vite que son ombre (by Nicolas Houle)



« Je ne sais pas si les autres trouvent ça difficile de travailler à mes côtés, mais moi, je trouve ça dur de travailler avec moi-même », rigole Joseph Arthur.

C’est avec son groupe que le chanteur, guitariste et peintre atterrira à la place D’Youville, ce soir, à 18 h 30. Il a connu les six Lonely Astronauts durant la tournée de Nuclear Daydream, à l’automne 2006, et la chimie a été telle qu’ils ont rapidement décidé d’entrer en studio. Ils en sont ressortis avec le très rock Let’s Just Be. De facture volontairement brouillonne, avec des segments reposant sur l’inspiration du moment, le disque tranche avec les autres albums d’Arthur. Pour le principal intéressé, cette aventure est une bouffée d’air frais. Celui qui avait l’habitude de se produire seul sur scène, bâtissant ses chansons avec des boucles sonores tout en peignant des tableaux, s’est déchargé d’une certaine responsabilité.

« C’est important pour les autres musiciens de prendre leur place et pour le public d’entendre quelque chose de neuf, juge-t-il. Vous vous devez de rester inspiré, et je crois que les gens aiment entendre de nouvelles choses. »


Créateur prolifique

Let’s Just Be est paru six mois plus tard que son prédécesseur. À sa sortie, Arthur, qui avait enregistré quelque 80 pièces avec sa bande, s’attendait à lancer un autre album à l’automne 2007. Si on ajoute à cela que le chanteur signe des compositions logeant sur son site Web ou sur des maxis, d’autres qui sont écrites pour des projets parallèles ou pour des causes humanitaires, on peut dire qu’il est sacrément prolifique. Le plus fascinant, c’est qu’il ne fait pas de distinction entre œuvres majeures et œuvres mineures.

« Je discutais avec ma mère et elle me disait : “Pourquoi ne mets-tu pas cette chanson-là sur un véritable album ?” C’était une pièce qui était sur un maxi, alors je tentais de lui expliquer que c’était un album aussi valable qu’un autre... Pour moi, c’est comme lorsque je donne un spectacle : s’il n’y a que 10 personnes, je ne travaillerai pas moins fort. »

Joseph Arthur ne pourrait respirer sans l’oxygène qu’est la culture. Il n’ira pas jusqu’à dire qu’il suffoquait durant ces années passées à Akron, la ville industrielle qui l’a vu naître, en Ohio. Or il apparaît clair qu’il ne pouvait échapper à sa destinée. Un coup d’œil au blogue qu’il tient sur son site Web (www.josepharthur.com) en témoigne : les entrées prennent la forme de poèmes.

« L’écriture, la musique ou la peinture peuvent être profonds, superficiels ou simplement amusants, mais j’ai tendance à entrer aisément dans l’univers de la poésie, à activer les différents boutons de ce langage, admet-il. Ce doit être dans ma nature... »


La scène

Bien qu’il soit reconnu par les critiques et les fans comme un artiste majeur, au talent exceptionnel, le chanteur qui a été découvert par Peter Gabriel, il y a 10 ans, doit encore mettre les bouchées doubles pour se faire entendre.

Il reconnaît que cette lutte constante alimente sa création, or au même moment elle l’en distrait : avec la naissance de sa propre étiquette de disques, il porte les chapeaux de musicien, de réalisateur et d’homme d’affaires. Arthur dit apprendre les diverses facettes de son métier quotidiennement, quoique c’est sur les planches qu’il préfère œuvrer. Ça tombe bien : en cette période où l’industrie musicale semble engagée dans une voie sans issue, la meilleure solution pour rejoindre le public reste les spectacles — qu’Arthur n’hésite pas à enregistrer pour en tirer des albums vendus au terme des représentations.

« C’est parfois épuisant de faire autant de spectacles, car je suis incapable de prendre ça à la légère. Je suis entier. En même temps, je sens que la musique est une vibration positive, qu’elle a des propriétés bénéfiques, alors avoir la chance de chanter chaque soir et d’avoir un public qui reçoit cette énergie, c’est incroyable. Il y a tant de gens qui n’auront jamais l’occasion ou le courage de s’exprimer, je me sens franchement chanceux. »




 

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